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PGW 24 – L’Association CapGame

Cela fait un moment que j'entends parler de CapGame, une association ultra impliquée dans l'accessibilité. D'ailleurs, hasard du calendrier, j'ai juste avant eu un entretien avec un responsable de Xbox, qui a cité l'association en exemple des actions menées sur le sujet.

Mais, j'avoue, j'ignorais beaucoup de ce qu'ils accomplissaient, alors j'ai accepté avec grand plaisir l'entretien que m'a proposé Stéphane Laurent à l'occasion de la Paris Games Week.

Nous commençons par discuter des actions déployées à l'occasion du salon où, d'ailleurs, pour la première fois depuis pas mal d'années, aucun stand ne leur a été offert par les organisateurs. Leurs membres sont malgré tout impliqués, notamment à l'accueil de points d'information spéciaux, avec des animateurs volants, des interprètes LSF, des plans en braille, ou des fauteuils en prêt. Ils sont également présents sur plusieurs stands (Xbox, Ubisoft et Bandai) au bon vouloir de chaque éditeur.

Historiquement, l'association fondée en 2013 avait comme but d'accompagner les joueurs en situation de handicap dans leur pratique des jeux vidéo. Le fondateur, Guillaume Essel, ergothérapeute, rencontrait souvent des jeunes qui lui demandaient : comment je peux jouer ? Les solutions sont méconnues du grand public, mais existent. Sans être un concepteur ou un vendeur, l'association effectue de la veille technologique, et apporte des réponses en termes de logiciels tiers ou de périphériques adaptés.

Une autre question se pose ensuite : à quoi jouer ? C'est là qu'interviennent les tests de jeux, une partie dont s'occupe beaucoup Stéphane. Cet ancien éducateur, spécialisé dans les déficiences intellectuelles, utilise des grilles de tests pour classer les jeux de façon homogène, afin que chaque personne, en fonction de son handicap, sache si un jeu est fait pour lui ou non. Les articles sont réalisés en anglais (pour augmenter la visibilité notamment auprès des studios), et doublés en audio via une voix automatique. Certains sont également réalisés en vidéo, d'abord sur Twitch, puis ensuite réuploadés sur YouTube, avec des sous-titres.

Une autre interrogation est arrivée, cette fois venue des studios et des éditeurs : comment fait-on pour que nos jeux soient accessibles ? Pour répondre à cette problématique, l'association s'est orientée vers du consulting, devenant un pont entre handicap et jeu vidéo. Elle a participé à de nombreux efforts de sensibilisation, et les choses changent depuis 2017 (auparavant, le sujet n'était jamais abordé). De nombreux gros acteurs du secteur sont désormais assez matures pour intégrer des problématiques d'accessibilité très tôt dans leurs productions. Cela a entraîné une conséquence très intéressante : la professionnalisation de joueurs engagés comme testeurs sur des productions de jeux vidéo.

Au passage, certains ajouts réalisés pour l'accessibilité se révèlent être utiles à la masse. Si on prend l'exemple des sous-titres, le pourcentage de la population qui en a besoin est très faible à la base. Mais la tendance d'en inclure s'est de plus en plus généralisée. Aujourd'hui, les jeux les activent par défaut, et une grosse majorité des joueurs les utilise.

Ensuite, c'est une foultitude d'autres missions menées au quotidien pour répondre à des problématiques précises : être présent sur des événements ponctuels pour traduire en langue des signes française, répondre à des demandes d'organisateurs de tournois, des clubs d'eSport ou des médiathèques qui veulent améliorer leur inclusivité, accompagner des testeurs jusqu'aux studios... Un truc tout bête, il nous cite le cas d'un joueur qui n'a pas pu monter sur scène, lors d'une compétition, car rien n'avait été prévu pour son fauteuil roulant, et qui a été déclaré forfait...

Des thésards travaillent sur différents sujets importants, afin de mieux répondre à ces différentes problématiques : quelles fonctionnalités intégrer dans les jeux, comment rendre accessibles certains contenus très spécifiques ou encore quantifier les différences de performance des différents périphériques.

L'aspect communautaire est important, avec la nécessité d'aller à deux vitesses. Certains joueurs en situation de handicap tiennent à jouer dans les mêmes structures que les autres, et à participer aux mêmes évènements. D'autres préfèrent se retrouver entre eux, ils ne sont pas prêts à se mêler aux joueurs valides. C'est dans ce contexte que CapGame a lancé la CapGame Arena, une compétition inclusive, mêlant joueurs en situation de handicap et joueurs valides.

Notre discussion s'échappe à plusieurs reprises, nous parlons de nos expériences, et il nous cite des exemples de joueurs qui se basent sur le son. Les jeux de combat possèdent généralement un effet sonore différent pour chaque personnage et action du jeu, ce qui permet d'anticiper, sans voir l'écran. De même, sur certains jeux de course, le son est spatialisé par rapport à la trajectoire idéale. Il suffit d'ajouter des indications comme dans les rallyes, et un non-voyant est capable de se lancer sur un circuit ! Un style de jeu ultra accessible d'ailleurs, car en mode de jeu assisté (où l'accélération et le freinage sont automatiques), la conduite et la direction ne demandent que deux boutons.

L'association compte énormément sur ses bénévoles, et ne compte que trois salariés (enfin, deux et un thésard), avec en complément le bureau (le président et la trésorière). Soit cinq membres très actifs. Heureusement, ils peuvent compter sur des testeurs bénévoles, des streamers, et même plus récemment une nouvelle équipe de rédacteurs sur le blog.

Mais c'est bien peu par rapport à l'ampleur de la tâche, et l'énorme travail de communication continuel à effectuer. Mais Philippe me l'avoue : il préfère être dans l'action plutôt que dans la communication.

Leurs ambitions pour les prochaines années sont amusantes : disparaître ! Car cela voudrait dire qu'on n'a plus besoin d'eux car c'est enfin rentré dans les mœurs. Un vœu pieux, mais il y a encore bien trop de joueurs qui s’interdisent de jouer alors qu'il existe de nombreuses possibilités, et que l'apport serait ultra bénéfique pour cette population : souvent chez soi, à ne pas pouvoir beaucoup bouger, ou sociabiliser avec d'autres personnes. Le jeu est un outil magnifique pour combattre l’isolement, le stress, la gestion de la douleur...

Mais l'espoir subsiste. Je le mentionnais, les mentalités changent, les productions réfléchissent à ces problématiques dès le début, et les constructeurs proposent des périphériques de plus en plus adaptés. Beaucoup de joueurs s'assument sur leurs chaines, et aident à la prise de conscience du grand public. C'est aussi l'occasion de faire remarquer aux joueurs valides l'exploit derrière certaines prouesses. Mettez une tige sous le menton à quelqu'un de non habitué pour contrôler son personnage, et vous verrez comment il s'en sort !

CapGame assiste aussi à de belles synergies locales sur certaines événements, où les associations, les villes, les structures médico-légales... collaborent pour rendre le jeu inclusif.

Un beau moment, passé en compagnie d'un passionné. Si je n'étais pas déjà débordée, et impliquée dans trop de projets, j'aurais tellement envie d'apporter mon soutien à ce genre de structure. En tout cas, j'apporte aujourd'hui ma petite pierre à l'édifice, et je vous invite à aller les suivre sur leurs médias sociaux, et à leur offrir le maximum possible de visibilité dès que vous pouvez !



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