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Le mythe spartiate

Dans l'Antiquité, la Grèce était considérée comme un pinacle de la culture. Aujourd'hui encore, les philosophes athéniens sont vantés comme des classiques et des indispensables du programme scolaire. Quand on parle d'eux, on tombe sur de véritables légendes et je ne parle pas de leur mythologie : la victoire de Marathon et la course jusqu'à Athènes pour l'annoncer, le déséquilibre numérique de la bataille des Thermopiles, la chevauchée d'Alexandre le Grand jusqu'à des territoires inconnus de l'Occident (et qui le resteront jusqu'à la fin du Moyen-Age, un millénaire et demi plus tard)... Oui, ce sont des éléments guerriers et militaires, loin des penseurs cités plus tôt. Mais on a tendance à plus se focaliser sur les histoires de bruit et de fureur. Ainsi, parmi les trois grandes cités de l'époque, ce ne sont pas les grands centres politiques et culturels d'Athènes et de Thèbes dont on parle le plus souvent mais Sparte la guerrière. Sparte qui ne vivait que pour ces moments de bruit et de fureur. Il n'y a qu'à regarder tous ces jeux de stratégie où l'on nous propose d'incarner soit des grecs, soit des spartiates. Ou encore des jeux comme God of War, où le héros est présenté comme un guerrier spartiate sans que cela ne se justifie dans le scénario.

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Sparte apparait dès la mythologie grecque, mais dans un rôle mineur. Il y a sa fondation par le roi Lacédémon (qui donne son nom à la région) et sa femme Sparta (qui donne son nom à la ville). Tyndare, un de ses descendants, sera chassé de son trône par son demi-frère et restauré par le héros Héraclès (plus connu sous son nom latin Hercule). Jusqu'à la fin de l'Antiquité, les spartiates se vanteront de descendre de bâtards semés par ce demi-dieu. Le père de ce dernier ne sera pas non plus en reste. Zeus était réputé pour vouloir coucher avec toutes les jolies femmes du pays. Il vint à Léda, femme de Tyndare sous la forme d'un cygne. Elle en aurait accouché de deux œufs, chacun contenant deux enfants. Pollux et Hélène dans l'un, enfants de Zeus. Et Castor et Clytemnestre dans l'autre, enfants de son mari légitime. C'est cette génération-là qui est la plus connue. Castor et Pollux étaient des héros, plusieurs légendes se rapportent à eux : ils ont entre autres participé à la chasse du sanglier de Calydon ou la quête des Argonautes (les deux plus grands rassemblements de héros de l'époque) et ont affronté Thésée d'Athènes (celui du Minotaure) qui avait enlevé leur sœur Hélène. A leur morts, les Dioscures sont divinisés et placés dans les étoiles. Ce sont eux que la constellation des Gémeaux est sensée représenter. Le problème est qu'ils meurent jeunes, avant leur père. Leur sœur Clytemnestre étant mariée au roi Agamemnon de Mycènes, c'est le futur mari d'Hélène qui héritera du trône. Parmi tous les candidats représentants les plus grands rois de Grèce sera choisi Ménélas, frère du puissant Agamemnon. Leur fille Hermione avait neuf ans quand Hélène s'enfuit en compagnie du prince Pâris de Troie. Point de départ de la célèbre Guerre de Troie. A Ménélas succèdera Oreste, fils d'Agamemnon (lui-aussi héros de légendes) et époux d'Hermione. Le rôle de Sparte dans la mythologie grecque s'arrête là, les fondateurs de la lignée royale étant définis.

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Si Sparte est bien cité dans la mythologie grecque, ce n'est plus ni moins qu'autant que de nombreuses cités grecques. Que celles-ci aient un grand avenir par la suite (Athènes, Thèbes...) ou qu'elles aient disparu par la suite (Mycènes, pourtant principale puissance de la Grèce primitive). La ville historique a eu un développement plus difficile. Elle est située au sud du Péloponnèse, région montagneuse où l'agriculture est difficile. Les routes commerciales sont situées loin au nord. Il n'y a rien qui leur permette de se faire un nom. Au septième siècle avant notre ère, cela change. Le prince Lycurgue, de retour après un voyage de plusieurs années, va mettre en place pour son neveu une constitution complètement à part et qui excite toujours les imaginations. Il rend les conditions de vie plus difficiles que jamais, plaçant au dessus de la hiérarchie les guerriers. Dans cette société élitiste, les autres ne sont pas citoyens et leur statut vaut à peine mieux que celui d'esclave. Le principe est apparenté au "triompher ou périr". Et cela marche. L'armée spartiate, la seule armée de métier de toute la Grèce, va conquérir la majorité du Péloponnèse, vivant des tributs que leur versent les cités vaincues. Ils deviennent ainsi l'une des trois principales villes de la période dite classique. Deux siècles plus tard, les Guerres Médiques vont leur apporter leur apogée. L'Empire Perse avait conquis tous les territoires entre la mer méditerranée (de la Turquie à l'Egypte) à l'ouest jusqu'à la frontière de l'Inde à l'est. Un géant aux armées très aguerries contre la toute petite Grèce. En leur résistant, les hoplites (nom des soldats grecs) ont prouvé qu'ils étaient les meilleurs guerriers de l'époque. Et les spartiates étaient leur élite.

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C'était pourtant mal parti durant la première guerre. Après avoir jeté les envoyés du roi Darius Ier dans un puits (oui, ils l'ont vraiment fait), ils ont attendu la fin de cérémonies religieuses (à ce sujet, contrairement à l'idée reçue la divinité la plus vénérée à Sparte n'était pas le dieu de la guerre Arès, ils privilégiaient plutôt plusieurs déesses dont Athéna et Artémis). Ils sont arrivés sur le champ de bataille après la victoire décisive de Marathon, les frustrant de la gloire du champ de bataille. Dix ans plus tard, lors de l'offensive de Xerxès Ier, le nouveau roi spartiate Léonidas Ier refuse de laisser la situation se reproduire. Ignorant les avis des nobles et notables de la cité, il emmène avec lui ses gardes du corps avant la fin des cérémonies. C'est la fameuse aventure des 300 aux Thermopyles. En réalité, si le contingent spartiate était bien de 300 hommes, Léonidas avait été nommé à la tête d'une coalition avoisinant les 7 000 fantassins. L'armée perse, en face, se comptait en centaines de milliers (x00 000, le nombre exact n'est pas connu). La stratégie, elle, est connue. Les Thermopyles (qui se trouvent au milieu de la Grèce, les cités du nord ayant choisi de se soumettre sans se battre) sont un défilé, assez étroit pour neutraliser l'avantage du nombre. Et Xerxès fit l'erreur d'envoyer ses troupes d'élites dès le premier jour. Elles se brisèrent sur la muraille de boucliers spartiates et se firent anéantir. La seconde journée, les vagues successives s'enchainèrent sans réussir à faire mieux. Les généraux perses durent se résoudre à employer un passage révélé par un traitre grec pour encercler l'ennemi. Léonidas laissa partir la majorité de ses hommes, ne gardant avec lui que ses 300 (les lois de Lycurgue leur interdisant de battre en retraite) et des volontaires. Le troisième jour, 2 000 grecs furent attaqués de plusieurs côtés et furent massacrés. Mais les perses ne purent oublier l'humiliation infligée par ces spartiates. Après plusieurs batailles, victoires (mise à sac d'Athènes) comme défaite (destruction de la flotte perse à Salamines par la flotte athénienne), la bataille de Platées les voit affronter une armée comprenant entre 40 000 et 100 000 grecs avec à leur tête 10 000 spartiates. Xerxès n'est plus là pour voir la déroute des siens, il est rentré se cacher en Perse depuis longtemps.

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Thèbes s'étant soumise à la Perse, son prestige s'effondre et les deux seules puissances de la Grèce sont Sparte et Athènes. Ils se livrent alors à la Guerre du Péloponnèse jusqu'à la fin du cinquième siècle avant notre ère et dont Sparte ressort vainqueur. Pour eux, c'est le début de la fin. Toute la Grèce leur payant tribut, l'élite devient de plus en plus riche et les lois de Lycurgue sont affaiblies. Plus de luxe est autorisé, la situation des jeunes soldats n'est plus aussi précaire ni dangereuse qu'elle devrait l'être. Par contre, vis-à-vis des inférieurs, aucun assouplissement aidant à un certain recrutement. La paix empêche les classes moyennes de guerriers de récupérer des butins qui financeraient la formation et l'achat d'équipement de leurs enfants. Le nombre de citoyens spartiates baisse, et les membres de son armée sont moins prêts à tout. Le nouveau roi Agésilas II tentera une grande campagne pour conquérir l'empire Perse, mais son adversaire finança la rébellion des cités rivales et il dut faire demi-tour. A la fin de son règne, cet Agésilas verra même l'impensable se produire : Thèbes réussira à reprendre son indépendance en battant l'armée spartiate à Leuctres. La seule fois de l'Histoire où la cause de la défaite de Sparte n'est pas causée par la supériorité numérique de l'ennemi. La cité ne s'en releva jamais. Ses alliances se sont effondré et leurs voisins de plus en plus proches ont repris leur indépendance. Thèbes gardera la première place en Grèce pendant quelques années avant qu'Athènes de les déloge. Alors que dans le nord commence à se préparer un nouveau géant : la Macédoine de Philippe II et Alexandre III le Grand. Sparte n'est plus qu'une cité grecque comme les autres, son armée n'a plus rien d'exceptionnel. Et ce jusqu'à ce que Rome absorbe la région. Il n'y a plus de ces guerriers spartiates qui ont tant marqué l'imagination. Et qui vivent plus que dans des livres d'Histoire, mais aussi des romans, bds, films et jeux vidéo.



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