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SWTOR – Prélogie, absorption, expansion et réorientation

Cet article se base non seulement sur des faits avérés, mais aussi des sentiments et observations personnelles.

Dans un premier article, j'ai abordé la fondation de l'Univers Etendu, les premières œuvres licenciées des années 80 et la structure coordonnée que les éditeurs Bantam Spectra et Dark Horse comics ont établie. Une collaboration en duo qui a donné une relance à l'intérêt porté aux films de Georges Lucas. Une relance sur laquelle l'édition spéciale a pu s'appuyer pour être un succès. Succès qui a convaincu Georges Lucas de se repencher sur sa saga et de tourner la Prélogie. D'une certaine manière, c'est un succès. Mais dans le même temps, il y a de quoi être inquiet. De nombreux univers étendus ont déjà vu le jour. Et ont été irrémédiablement été balayés, parfois morts-nés (une bd et puis s'en va). Même aujourd'hui, c'est très régulier : Marvel comics publie à presque chaque film des histoires vendues comme appartenant à cet univers particulier, mais les réalisateurs ne les lisent pas et n'en tiennent pas compte dans leurs scénarios. Déjà qu'ils ne se coordonnent même pas entre eux... Pourtant, l'Episode I va contenir plusieurs références encourageantes : ce n'est pas Georges Lucas qui a baptisé Coruscant mais la trilogie de la Croisade noire du Jedi fou de Timothy Zahn. Le premier à désigner Palpatine comme un Sith est Tom Veitch dans la bd l'Empire des ténèbres. Et les premières mentions de l'Episode II parlent de clones, et Zahn était le premier dans ses romans à associer des clones à la Guerre Noire dont Obi-Wan Kenobi parlait à Luke en lui donnant le sabre de son père. La sucette pour récompenser les fans qui étaient restés fidèles. Mais fidèles aussi à un univers qui n'était pas celui du créateur, qui va se faire omniprésent pour faire croire qu'il est le grand maître d’œuvre de tout ce qui a été fait. En vieillissant, la vision qu'il a échoué à faire prendre à la Trilogie s'est accentuée chez lui. L'Episode I sera un très gros échec critique, son visionnage faisant craindre à certains fans qu'il tue ainsi l'univers (ce qui est déjà arrivé à d'autres licences). Le succès financier, lui, était là mais déjà assuré par le succès de l'édition spéciale. Si vous avez bien lu ma première partie, vous aurez compris que cet Episode I se situe dans la lignée des produits pour enfants qui avaient tant échoué durant la décennie passée. J'ai songé à illustrer ce paragraphe avec une image de gungan, mais ce simple nom me donne des poussées de côté Obscur. Alors à la place je vais mettre une photo de ce qui est considéré comme le meilleur du film.

dark maul duel

La machine a eu un raté, mais Georges Lucas a construit son empire sur des produits dérivés. Il sait comment la regonfler pour la relancer. On inonde le marché de jouets, on rajoute des histoires allant dans le sens du film. Côté bds, Dark Horse termine ses travaux liés à son grand partenariat avec Bantam et prend contact avec son successeur DelRey. Ils n'auront pas grand chose à se dire pour développer de nouveaux projets conjointement. Alors l'éditeur de comics propulse sa nouvelle génération d'auteurs et de dessinateurs dans différentes histoires entourant l'Episode I puis la Prélogie sous le nom Republic. Traduit sous plusieurs noms en France. Ses arcs les plus célèbres mettront en scène les créés pour l'occasion Quinlan Vos et Aayla Secura par Jon Ostrander et Jan Duursema. De ces deux personnages, la seconde apparaitra dans les Episodes II et III. Les héros des films Obi-Wan Kenobi et son apprenti Anakin Skywalker sont évidemment très exploités mais par peur d'entrer en concurrence avec les films de Georges Lucas il ne sont pas complètement développés. Et la plupart des histoires les concernant manquent de ce fait de profondeur et d'intérêt. Quant aux histoires qui ne sont pas exclusives à cette période de films, elles se comptent sur les doigts. Je citerai parmi eux Jedi vs. Sith de Darko Macan, première histoire de Dark Bane devant relier certaines parties de l'Episode I plus ou moins contradictoires avec l'Univers Etendu antérieur.

dark bane

Côté romans, DelRey avait un gros héritage à régler en reprenant la licence de Bantam Spectra. C'est pourquoi sa ligne éditoriale se divise rapidement en deux. D'un côté ils vont se positionner à la suite de leur prédécesseur. Puis une fois ceci établi se raccorder à la Prélogie pour surfer sur ces films. Entre les Episodes I et II, seuls deux romans sont sortis : Dark Maul l'ombre du chasseur de Michael Reaves et Planète rebelle de Greg Bear. Mais une fois l'Attaque des clones sorti, une guerre officiellement déclarée, une avalanche de titres surfant dessus va faire son apparition. Une gestion complètement anarchique, sans unité de contrôle central. Les personnages des films seront privilégiés par des auteurs voulant profiter de leur popularité, sans beaucoup se concerter entre eux. Ce qui donne des surexploitations et autres récurrences parfois à la limite de la contradiction. Ce fouillis en perd en qualité, et les principaux romans qui survolent ce fatras sont le cycle des Republic Commando de Karen Traviss. Citons aussi sur la période la novélisation de l'Episode III par Matthew Stover, truffé de références à l'UE qui doublent le nombre de pages sans enlever de qualité (malheureusement, ces ajouts le rendront plus tard non canon car il utilisait aussi des scènes coupées au montage comme la mort du maître Shaak Ti). La gestion de la partie post-Bantam est aussi compliquée pour voir des œuvres sortir du lot, mais pour des raisons différentes. C'est la période de la guerre contre les Yuuzhan Vong, avec des histoires qui s'enchainent avec différents auteurs. On ne sait pas s'il s'agit d'un seul et même cycle ou plusieurs mis bout à bout. La qualité est plus homogène et se priver d'un tome peut causer des trous dans la continuité. Au fond, sur cette série, le plus intéressant est de regarder les noms des auteurs. Un mélange de gros noms qui ont travaillé sur Donjon & Dragons/Royaumes oubliés (R.A. Salvatore pou l'ouverture du cycle Vecteur Prime, Troy Denning, Elaine Cunningham), d'anciens auteurs de Bantam (Mickael Stackpole, Aaron Allston, Kathy Tyers) et des nouveaux qui vont se tailler un trou dans l'univers (James Luceno pour Les agents du Chaos et le final La Force unifiée, mais aussi depuis tout un tas d'autres romans depuis sur différentes époques qui en font un spécialiste de l'univers). Toutefois, à part pour les auteurs rescapés, le style des histoires se rapproche beaucoup plus de la période de la Prélogie que de celles de Bantam : les apprentis de Luke Skywalker ne se contentent plus de faire de la figuration en laissant deux ou trois d'entre eux prendre toute la place, ils viennent en masse au premier plan agiter leurs sabres lasers. Au final, ces deux groupes de romans verront leurs conclusions peu de temps après la sortie de l'Episode III, période de renégociation des contrats d'attribution de la licence que DelRey réussira à conserver.

yuuzhan-vong

Côté jeux vidéos, on se retrouve aussi partagé entre ancien et nouveaux univers. La série Dark Forces/Jedi Knight achève son histoire. La série Rogue Squadron perd dès son deuxième exemplaire cette histoire qui liait les missions. C'est Battle for Naboo et Starfighter qui eux en racontent pour accompagner leur pilotage. Racers, le jeu de course inspiré de l'Episode I. Battlefront pour les amateurs de fps de guerre. Et comment s'appelait le STR déjà ? Ah oui, Rebellion, Force Commander, Galactic Battlegrounds... En fait, ici comme ailleurs, on est inondé de nouveaux titres qui utilisent la licence, sur plusieurs fronts. Il reste tout de même la série des Knight of the Old Republic à citer, deux jeux de rôles qui se passaient dans un très lointain passé et tous les deux récompensés parmi les meilleurs jeux de leurs années de sortie. Et ce même si le second est sorti inachevé : les développeurs avaient été trop ambitieux et ont été obligés de faire des coupes de dernier moment pour respecter la deadline. Mais ils sont toujours à l'écoute de la communauté et n'hésitent pas à répondre à leurs questions quand des fans moddeurs veulent restaurer le contenu manquant. Neuf ans plus tard, ils continuent toujours. Et enfin il y a Star Wars Galaxies, le MMORPG. Très important d'en parler car pour moi il est la parfaite illustration des changements qui arrivent à cet époque. Sorti en 2003, il se passait entre les épisodes IV et V et donc s'appuyait sur le contexte de la Trilogie. Comme tous les MMORPG de l'époque, c'était un sandbox dont certaines possibilités ont de quoi faire rougir son "successeur" TOR (sur lequel je reviendrai dans la troisième partie) et plutôt orienté JdR. Un jeu de niche pour fans connaissant bien l'univers, donc en théorie plutôt des fans de l'UE pré-Prélogie. Les Jedi y sont très rares, ce qui est logique. Il avait un certain succès, suffisant pour l'époque. Mais un évènement extérieur qui a changé la culture (la sortie de World of Warcraft qui a redéfini le genre mmorpg et ses attentes) et la nouvelle orientation interne (volonté de se rapprocher de la Prélogie pour atteindre son public) ont tout chamboulé dans cet univers. L'extension Trials of Obi-Wan, sortie en 2005 en même temps que l'épisode III en dvd, a voulu simplifier les règles de jeu pour se rapprocher de la nouvelle norme Theme park et mettre des Jedi partout. Les joueurs ont refusé en masse cette nouvelle approche, sont partis et le jeu a connu une (très) longue agonie jusqu'en 2011 où les serveur ont été fermés pour laisser la place à un nouveau MMORPG. On pourrait même faire un parallèle avec ces fans de la première heure qui n'ont pas retrouvé leur Star Wars dans cet univers de la Prélogie est considèrent depuis que tout ce qui est sorti après 1998 n'a plus aucune valeur.

galaxies

Là, je suis évidemment obligé de parler du grand débat. Est-ce que les films de la Prélogie sont inférieurs aux originaux. Les anciens qui ont découvert la saga avec les épisodes IV à VI répondent oui. Les plus jeunes, pour qui les I à III sont plus accessibles disent non. Je pense que vous avez compris que j'appartiens aux premiers, ma petite sœur me répétant d'ailleurs assez souvent combien je suis vieux. Mais ce n'est pas pour une raison d'ordre de découverte. Je serais bien en peine de décrire leurs qualités intrinsèques, surtout tournés à des époques où les qualités demandées ne sont pas les mêmes. Un historien pourrait vous parler du Nouvel Hollywood qui a suivi l'effondrement et la crise des studios dans les années 60. Le manque de moyens était alors compensé par un style très proche du cinéma indépendant. De très nombreux réalisateurs deviennent des légendes que le cinéma moderne est incapable d'égaler. Mais parmi la génération montante, l'auteur de deux succès critiques mais pas publics souhaite partir dans quelque chose de plus simple, du divertissement où l'on ne se prendrait pas la tête. Il s'appelle Georges Lucas et en tant que réalisateur (Star Wars) puis producteur (Star Wars, Indiana Jones... je ne vais pas vous faire la liste, vous la connaissez) il va redéfinir le système hollywoodien. La Trilogie a eu un tel impact parce qu'elle était fondamentalement différente ce à quoi le public était habitué. C'est aussi arrivé au bon moment, celui où le public avait envie de quelque chose de plus léger. C'était donc révolutionnaire. La Prélogie, elle, n'a rien de révolutionnaire. Ce ne sont que des blockbusters classiques au milieu d'autres blockbusters qui sortent chaque année. Dans ce système, pour se différencier on mise sur le spectaculaire. Souvent au détriment du scénario et du talent des acteurs. Les faiblesses d'un vieux réalisateur qui n'a plus rien fait depuis plus de vingt ans se sentent quand il mise sur des acteurs mauvais (oui, Hayden Christensen) ou qui se considèrent assez connus pour ne plus avoir à donner leur maximum dans les films qui n'en valent pas la peine (Nathalie Portman entrait dans cette phase avec l'Episode II). Pour le scénario, le genre de la science-fiction dont Star Wars est un sous-genre (pour être exact, c'est un space-opéra) a été largement exploité car plus facile de poser des choses démesurée sans se soucier de fond. Et l'est toujours (Petite inquiétude pour l'épisode VII, Star Trek était réputé pour son fond mais les deux derniers films de J.J. Abrams tiennent de ce point de vue là plus de la parodie et de la farce. Le créateur de cet univers a dû se retourner plusieurs fois dans sa tombe). Avec son tournage en numérique qui facilite les ajouts par ordinateur, la Prélogie va tellement dans la démesure Hollywoodienne que le reste semble devenir secondaire. Enfin, certains choix de Georges Lucas d'aller dans des directions inattendues (le côté christique d'Anakin par exemple) pas toujours comprises et acceptées par les fans. Tout ça a aidé à lui créer une mauvaise réputation.

yoda

Le titre que j'ai donné à cette partie résume très bien ce qui est arrivé à l'Univers Etendu de Star Wars durant ces 6 années. Pendant la décennie précédente, il s'était construit sans Georges Lucas et son succès lui avait permis de mettre en chantier la Prélogie. Il s'en est servi pour assurer un certain succès à ses nouveaux films, principalement l'Episode I. Il a ainsi réabsorbé ce qui était issu de son œuvre, et avait pu ainsi se remettre au centre de cet univers. Pour accompagner les épisodes suivant, il a demandé aux différents titulaires des licences sur plusieurs médias de continuer les histoires des années manquantes. Et de le faire en masse. C'est la période où le plus de nouveaux éléments sortent. Expansion. Et réorientation car prises séparément, les deux trilogies sont très différentes. Et comme il devait maintenant accompagner la Prélogie, l'UE adopte son ton et ses habitudes. Cela ne se fait pas sans pertes. Je l'ai dit quand j'ai parlé de Galaxies, une partie des fans s'est senti trahie par ces nouvelles approches et ont abandonné Star Wars. Ils ne s'y reconnaissaient plus. Georges Lucas avait joué la sécurité financière en cherchant à attirer un nouveau public plus enfantin plutôt que satisfaire les anciens fans qui ne seront plus là demain. Mais voilà, chaque génération qui commence par le premier film de sa trilogie a grandi avant d'arriver au troisième. Que va-t-il se passer maintenant que les six films sont finis ? Les nouveaux fans vont aller rejoindre les anciens ? Anciens qui le critiquent déjà beaucoup. Les autres vont-ils faire la même chose ? Quel est l'avenir de Star Wars ? C'est ce que nous verrons dans une troisième et dernière partie.



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